sábado, 19 de febrero de 2011
L`Empire de la Pétasse
L`EMPIRE DE LA PÉTASSE
Jadis la bourgeoise et la putain se partageaint des rôles bien définis: à l`une le convenable, à l`autre le vulgaire et le voyant. Mais le Second Empire en France véecut sous la hantise d`une confusion des codes, d`une gangrêne progressive du corps social par les bas-fonds: l`idée qu`une grisette puisse ressembler à une honnête bourgeoise terrifiait les consciences. Cette distinction s`est redistribuéee autrement de nos jours: la racoleuse est souvent chic et stricte, la mêre de famille aime s`habiller en traînée. On voit ainsi depuis deux décennies des dames, des jeunes filles déevoiler leur anatomie, rehausser leurs seins et leurs fesses, laisser le string sortir du pantalon, bref se donner des allures de hardeuses avec un naturel désarmant. Transfert de symboles: l`uniforme des professions véenales devient celui de la femme ordinaire. Déguisée en scandaleuse, celle-ci instaure l`hégémonie mondiale de la pétasse avec son corps saucissonné, ses formes soulignées à outrance. Le mot lui-même avec sa finale péjorative (...) tèmoigne de notre ambivalence à l`égard du phénomène: un peu de la réprobation attachée aux prostituées s`est reportée sur leurs parodies mondaines. Il ne signifie pas le sexy mais son exagération, son état hyperbolique.
Il est curieux que les femmes, ayant conquis leur indépendance, se constituent ainsi en objets de convoitise. Pourquoi afficher son patrimoine libidinal en public? Pour échapper à l`anonymat mais surtout pour dire: je suis torride, sur le chapitre des promesses sensuelles, vous ne me prendrez jamais en défaut. La pétasse conjoint les deux modèles de l`adolescente et de l`aguicheuse, jeunesse et expertise. Elle sous-tend dextérité d`alcôve, luxure radieuse. L`internationale des pétasses a d`ailleurs ses icônes: Britney Spears, Paris Hilton, Lady Gaga, Victoria Beckham, chipies dépoitraillées et futiles, porteuses d`une sous-culture de la féminité agressive. Cet affichage excentrique doit se comprendre comme une hésitation sur le genre. Le jeu sur les clichès n`est pas moins prégnant du côté des hommes: Rambo, Terminator et tous les caïds gonflès aux stéroïdes sont les symptômes d`une époque qui ne croit plus dans la virilité et doit surenchérir sur la grosseur du biceps et le volume des pectoraux. De même l`exaltation du machisme primaire dans certains milieux gays, l`obsession des bites dures, énormes, les accoutrements en policiers ou néo-nazis couverts de chaînes, coiffés de képis ont une dimenion parodique. Les grosses brutes bodybuildées, vêtues de pantalons hypermoulants ouverts devant et derrière ne sont pas des SS dèguisès mais des comédiens qui piêgent la virilité dans ses signes mêmes. La pouffiasse, le néo-macho, le travesti, le drag queen, la lesbienne butch fleurissent sur le dérèglement des rôles.
On aurait tort de croire la pétasse tombée dans les fureurs de Messaline. De même que les femmes d`autrefois n`étaient pas si honnêtes qu`elles en avaient l`air, celles d`aujourd`hui, harnachées, ne sont pas si délurées qu`on le croit (...). Le mauvais genre n`est pas toujous synonyme de fille facile. Il s`agit surtout de capter l`attention avec un sens de la mise en scêne, un talent dans l`étalage qui forcent le respect. Explosion mammaire, gonflement des lèvres, rondeurs callipyges, tatouages divers, tenues affriolantes ne proclament qu`une chose: regardez-moi. L`honorable ménagère, contrainte de s`accoutrer en roulure, est le martyr d`une époque qui a érigé le sexe en clef des comportements humains. (...) La péetasse toutefois est trop vraie pour être crèdible. Sa provocation ressembel à un pied de nez aux stéréotypes de la femme-objet qu`elle reconduit et désamorce en même temps. Elle fait de son corps le théâtre où les poncifs fleurissenet et dépérissent, superpose les masques pour n`être prisonnier d`aucun. L`indécent n`est pas moins énigmatique que le bon genre. La nouvelle femme est peut-être l`addition de toutes les figures apparues au cours de l`Histoire: beauté vénéneuse et vierge froide, vamp perverse et mère aimante, midinette et meneuse d`hommes, dépravation et tendresse mêlées de la même facon que les nouvelles masculinités additionnent tous les visages de la virilité plus qu`ils ne les périment.
Sous le string de la pétasse, il y a toujours un coeur qui bat.
Pascal Bruckner
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tout cela fait partie du décervelage collectif !
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