jueves, 7 de octubre de 2010

Mal Mariez

MAL-MARIEZ (Confrairie des). Société imaginaire due à
l'imagination facétieuse d'un de ces nombreux écrivains qui au
dix-septième siècle, prirent les soucis de la vie conjugale pour
but de leurs railleries. L'édition originale de cet opuscule est
très-rare; nous l'avons inutilement cherchée sur les catalogues
les plus riches en ce genre, notamment sur celui du duc de la
Vallière (1784, 3 vol. in-8), et nous n'en trouvons aucune indi-
cation dans la curieuse Bibliographie (spéciale) des ouvrages
relatifs à l`amour, aux femmes et au mariage, 2^ édition,
Paris, J. Gay, i864_, in-8. Le texte que nous reproduisons nous
est fourni par une copie manuscrite faisant partie de la biblio-
thèque formée par M. Leber (n° 261 5 du catalogue imprimé) et
acquise par la ville de Rouen.

La Confrairie des Mal-Mariés, ou Martyrs, assemblés rue
Tournecul. — La Confrairie des Martyrs. — Aduertissement
aux confrères et sœurs de la haute et basse, pauure et riche,
vieille et nouuelle, et noble et roturière Confrairie des Mar-
tyrs, martyrisez par leurs honnestes,indiscrettes et maladuisées
femmes nouvellement instalées au chasteau (sic) de Bissestre, à
présent appelle Malencontre.

Mes tres-chers confrères, vous n'estes pas ignorans que dez
long-temps il y a une Confrairie des Martyrs érigée ie ne sçay
où, instituée par ie ne sçay qui, et de laquelle on parle ie ne
sçay comment. Mais l'ayant meurement considérée en toutes
ses dépendances; après auoir este prié de plusieurs, et spéciale-
ment de ceux de la rue des mauuaises paroles, et de la rue tour-
neculj i'ay délibéré sur leur instante prière et pour la commo-
dité de nous tous, de designer un lieu asseuré où l'assemblée se
trouuera, s'il leur plaist pour y faire eslection des Maistres et
Gouuerneurs de la Confrairie, et pour délibérer des choses qui
y sont requises et nécessaires : et pour ce, il est enioint de par
Thibault le Persécuté, General des Affligez, à tous qu'il appar-
tiendraj de ne se présenter pour se faire enrooler, qui ne soient
chargez de persécutions et d'opprobres, principalement de fleures
quartaines, malebosses, voleurs et yvrognes et toutes autres in-
iures et supplices, pratiquez par les exécuteurs à l'endroit des-
dits Martyrs, et prendre garde que Martin baston n'y ait passé:
car il seroit du tout indigne de conuerser aucc lesdits martyrs.
Comme aussi ceux qui se présenteront deuant Monsieur le
Doyen et Messieurs les Gouuerneurs pour estre examinez leur
est enioint d'apporter le certificat de leur martyre ou mariage
dont la teneur s'ensuit.

Nous soussignés N. certifions que N. a esté accordé à Saint-
Près, fiancé à Saint Innocent, marié à Saint Merry , les
nopces faites à la Grimace, le souper à la valée de Misère, et
de là coucher à la rue de la Tannerie, et le lendemain s'en
alla {comme son devoir estoit) aux Martyrs, et sa femme aux
filles repenties, et à leur retour en leur maison, site en la rue
d'Amour sans souci, à présent appelée rue des Afflictions, et
paroisse de songe: auparauant se sont présente^ chacun
un bouquet, l'un fait de soucy, et Vautre de diuerses pensées,
et pour les conseruer les ont mis rafraischir dans une phiole
d'amertume remplie de larmes tombées du fin fond de leur en-
tendement.

Et vous tous à qui le semblable arriue plus souvent que tous
les iours, posez pour baze de votre espérance ce petit prouerbe
tant usité, patientia vincit omnia, la patience surmonte toutes
choses en nostre endroit. C'est la reine des vertus, aussi sera
(t) elle à la face de nostre Labaron ou enseigne auec la souffrance
qui sera au reuers, et nous fera sa harangue (malheur à nous)
qui ne vous est que par trop connue, usque ad finem patieris :
tu endureras iusques à la fin. Sus donc^ mes chers frèreS pre-
nons courage qu'un chacun garnisse sa bourse au desceu de son
persécuteur, afin qu'après que nous nous serons deuëment ac-
quitez de nos charges et deuoirs à l'endroit de la Confrairie
nous nous transportions au lieu nommé la Consolation, seis en
la rue d'Allégresse, à la joie nompareille^ pour là nous consoler
les uns les autres et nous conter nos fortunes, chacun scait les
siennes; et aussi, si quelqu'un auoit usé de quelques paroles
des-honnestes à l'endroit de son persécuteur, il en laue sa
bouche auparauant que de se mettre à table, où sera préparé le
festin somptueux et magnifique, garni de (ie ne vous dis rien)
toutes sortes de mets, apportez du royaume sans nom.

Statuts de la Confrairie. — Item sera fait eslection de deux
maistres les plus souffreteux et persécutés qui se puissent trou-
ver entre les confrères, et seront tenus establir des commis en
diuers endroits pour la commodité de ceux qui voudront se faire
enrooler.

Premièrement, en la rue qu'on appelle, va te coucher sans
souper.

Secondement, en la rue, ie suis maistre quand ie suis seul.

Troisiesmement en la rue, souuent faut que ie me taise.

Quatriesmement, en la rue doublée de reuesche.

Cinquiesmement pour les sœurs, en la rue pauée d'andouilles
sans cuire.

Sixiesmement, en la rue donnez leur du bon dans la mitaine.

Septiesmement, et nous ne receurons aucuns confrères si leur
chappeau ne tourne.

Huictiesmement, et ne receurons aucune sœur, si elle ne sait
dire, merci Dieu, les mains sur les roignons.

Neufiesmement, est fait deffenses à tous ceux et celles qui sont
tels, comme cy dessus a esté dit_, de s'y présenter, à peine d'en-
courir un affront signalé en présence de toute l'assemblée. Fait
ce iour de ma grande affliction, au mois de mon martyre, l'année
prens y garde si tu veux.

Tres-chers frères et sœurs, vous serez aduertis de vous trouuer
audit lieu des Martyrs, au matin, pour y receuoir vostre distri-
bution et vos bouquets à l'accoustumée, le lendemain des festes
de Pasques.

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