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miércoles, 7 de diciembre de 2011

Catéchisme libertin


CATÉCHISME LIBERTIN


DEMANDE.

Qu'est-ce qu'une putain?

RÉPONSE.

C'est une fille qui, ayant secoué toute pudeur, ne rougit plus de se
livrer avec les hommes aux plaisirs sensuels et charnels.

DEMANDE.

Quelles qualités doit avoir une putain?

RÉPONSE.

Trois qualités essentielles.

DEMANDE.

Quelles sont ces qualités?

RÉPONSE.

L'effronterie, la complaisance et la métamorphose.

DEMANDE.

Qu'entendez-vous par l'effronterie?

RÉPONSE.

J'entends qu'une fille qui se dévoue à ce commerce libidineux ne doit
avoir honte de rien: toutes les parties de son corps doivent être pour
les hommes ce qu'elles seraient pour elle-même en particulier;
c'est-à-dire que ses tétons, sa motte, son cul doivent lui être aussi
indifférents auprès de l'homme inconnu qu'elle amuse, que l'est à
l'égard d'une femme honnête la paume de sa main qu'elle ne rougit pas de
montrer.

DEMANDE.

Qu'est-ce que la complaisance dans une putain?

RÉPONSE.

C'est une amorce par laquelle elle sait adroitement conserver l'homme
passager, faisant usage de sa douceur naturelle, se prêtant librement
aux différents désirs de l'homme; par ce moyen elle le retient comme
dans des filets, et l'oblige, malgré lui, à retourner une autre fois
vers l'objet qui a si bien secondé sa passion momentanée.

DEMANDE.

Qu'entendez-vous par la métamorphose?

RÉPONSE.

J'entends qu'une vraie putain, renfermée dans les ressources de son art,
doit être comme un Protée, savoir prendre toutes les formes, varier les
attitudes du plaisir, suivant le temps, les circonstances et la nature
des tempéraments. Une putain recordée et aguerrie doit se faire une
étude particulière de ces différentes variations qui procurent
ordinairement le plaisir aux hommes; car il y a de la différence entre
amuser un homme froid, un blondin, ou un homme poilu et brun, entre
exciter une jeune barbe ou un vieillard sensuel: la nature, plus
impérieuse chez les uns et plus modérée chez les autres, exige par
conséquent des titillations différentes, des situations plus
voluptueuses, des attouchements plus piquants et plus libertins; et
telle putain qui découvrant seulement son cul à un jeune Ganymède le
ferait décharger jusqu'au sang, n'opérerait qu'une sensation ordinaire à
l'égard d'un autre; tandis qu'un tortillement de fesses voluptueusement
fait, plongerait l'homme à tempérament dans un torrent de délices, qui
causerait la mort au Narcisse fouteur et au paillard décrépit.

DEMANDE.

A quels signes caractéristiques distingue-t-on une putain de celle qui
ne l'est pas?

RÉPONSE.

Son habillement trop peu gazé, son maintien trop peu retenu, ses gestes
libres, sa conversation trop enjouée et trop lascive, son regard décidé
et sa marche effrontée sont les signes visibles qui la font reconnaître.
Il est cependant nécessaire pour son propre intérêt qu'elle en agisse
ainsi; car il est des hommes si timides auprès des femmes, que si une
putain tranchait avec eux de l'_Honesta_, ces hommes, qu'on peut
comparer à des puceaux, n'oseraient leur faire aucune proposition, et
par conséquent elles perdraient l'occasion de faire quelquefois une
bonne pratique, pour avoir affecté une modestie malentendue.

DEMANDE.

Mais, n'est-il pas possible qu'une putain imite en tout la décence et le
maintien réservé d'une honnête femme?

RÉPONSE.

Oui: et celles de ce genre sont les plus fines; elles amorcent par là le
nigaud qu'elles veulent duper; elles paraissent s'effaroucher de ses
propositions; mais c'est pour mieux l'enchaîner: et combien sont pris au
trébuchet, et s'imaginent aller cueillir la rose sans danger, tandis que
l'épine y tient fortement. Ces sortes de putains tirent beaucoup de
profit de ce commerce; mais aussi il n'appartient qu'à celles qui
peuvent tenir d'abord un certain ton de jouer ce personnage hypocrite.

DEMANDE.

Toutes les femmes ont-elles un penchant décidé à devenir putain?

RÉPONSE.

Toutes le sont ou désirent l'être; il n'y a guère que les convenances,
les bienséances qui retiennent la plupart; et toute fille qui succombe
même la première fois, dans un tête-à-tête, est déjà, dès le premier
pas, putain décidée; la chemise, une fois levée, la voilà familiarisée
avec son cul, autant que celle qui a joué du sien pendant dix ans.

DEMANDE.

La putain qui procure de la jouissance à l'homme, peut-elle s'y livrer
avec tous, sans s'exposer à altérer son propre tempérament?

RÉPONSE.

Il est un milieu à tout; il serait très imprudent à une putain de se
livrer avec excès au plaisir de la fouterie: une chair flasque et molle
serait bientôt le fruit de ce désordre; mais il est un raffinement de
volupté qui tient à la volupté même, et dont une adroite putain doit
faire usage. Une parole, un geste, un attouchement fait à propos, offre
à l'homme l'illusion du plaisir; il prend alors l'ombre de la volupté
pour la volupté même; et comme le coeur est un abîme impénétrable, la
putain consommée dans son art remplit souvent, par une jouissance
factice, les vues luxurieuses de l'homme, qui se contente de
l'apparence. Les femmes étant plus susceptibles et plus propres que tout
autre à ce genre d'escrime, il dépend d'elles de donner le change à
l'homme.

DEMANDE.

Une putain doit-elle procurer autant de plaisir à un fouteur de
vingt-quatre sous, qu'à celui qui la paie généreusement?

RÉPONSE.

Il est certain que la putain devant vivre de son métier, et le foutre
n'étant pas une substance qui puisse servir d'aliment, elle doit agir
avec ce fouteur comme avec le père Zorobabel, et lui dire;

NESCIO VOS...

«Je vis du con comme vous de l'autel.»

Cependant le grand art d'une putain qui veut se faire un nom, n'est pas
toujours de mettre à contribution les hommes qu'elle raccroche. Il en
est qui sont susceptibles de cette délicatesse; et touchés du
désintéressement qu'une putain leur témoigne, ils s'imaginent alors que
cette Laïs de rencontre est tout à coup éprise et coiffée de leur
physique, bien plus que du numéraire; leur amour-propre est flatté de
cette préférence. Le plaisir qui ne leur paraît pas acheté, se fait
mieux sentir; son aiguillon est plus mordant, et quelquefois la putain
gagne beaucoup à ce manège; au surplus, c'est à elle à discerner et à
connaître ses pratiques. Une putain bête ne fera jamais fortune; la
rusée peut essayer d'être dupe une ou deux fois, pour reprendre vingt
fois sa revanche avec d'autres. Il est constant aussi qu'un vieillard
cacochyme n'a pas le droit d'exiger qu'une jeune et fraîche putain se
harcelle après son chétif engin pour un modique salaire: Hercule et
Psyché peuvent quelquefois entrer chez elle pour y faire un coup fourré;
mais

Le forgeron atrabilaire,
Qui de son antre ténébreux,
Tout en boitant, vint à Cythère
Attrister les Ris et les Jeux,
De Vénus salir la ceinture,
Effaroucher la volupté,
Et souiller le lit de verdure
Qui sert de trône à la Beauté,

je ne lui connais point de charmes qui puisse le faire recevoir
_gratis_; il faut qu'il paie au poids de l'or le plaisir qui le suit:
c'est le prix de sa turpitude. Qu'une putain donc le plume, qu'elle en
tire pied ou aile, c'est le secret de son art. Il lui doit sans doute ce
tribut pour les outrages qu'il fait chaque jour à la volupté.

DEMANDE.

Comment doit se comporter une putain lorsqu'elle a donné dans l'oeil à
quelque bon fouteur?

RÉPONSE.

Il faut d'abord qu'elle mette celui-ci à son aise, et qu'elle le soit
aussi avec lui. On sait que le premier compliment d'un luron qui entre
chez une fille, est de lui prendre les tétons, et de passer de là
lestement au cul, de farfouiller ensuite sa motte. Ces petites agaceries
d'usage sont les avant-coureurs et les prémices du plaisir. La fille
alors doit, par de lascives caresses, de tendres attouchements, achever
la conquête de cet amoureux du moment; d'une main subtile elle doit
faire sauter le bouton de la culotte, tandis que de l'autre elle retient
en bride sa pine, irritée déjà par les premiers attouchements. C'est
alors qu'elle doit saisir ce moment favorable pour demander son salaire,
et le fouteur s'empressera de lui donner, pour ne point mettre de retard
entre les apprêts du plaisir et l'instant de la jouissance[1].

[1] Un défaut néanmoins dans la plupart des filles de joie, dont il
est bon de dire un mot pour leur gouverne, c'est de n'être jamais
contentes de ce qu'on leur donne. Présentez-leur trois livres, elles
en demandent six. Si vous cédez, leur importunité augmente; c'est un
ruban qu'il leur faut encore; c'est une bagatelle qu'elles réclament
pour leur guenon; mais ces contributions importantes leur sont très
souvent nuisibles, en ce que l'homme qui veut jouir n'est occupé que
de cet objet; se voyant arrêté dans sa marche, il regrette alors et
son argent et son foutre. C'est ainsi que les putains éloignent très
souvent d'excellentes pratiques de leurs taudions.

(...)

DEMANDE.

Une putain qui a la chaude-pisse ou la vérole doit-elle et peut-elle
sans remords baiser avec un homme sain?

RÉPONSE.

Non: et telle luxurieuse que soit une fille, telle passionnée qu'elle
puisse être, elle doit toujours se faire un crime de communiquer sa
corruption à un homme; elle doit préférer plutôt perdre sa pratique que
de l'empoisonner, et souvent un aveu naïf de sa part lui gagne l'estime
du fouteur, qui se contente alors du plaisir idéal et du service de la
main qui supplée à celui du con malade. La fille n'en reçoit pas moins
son tribut ordinaire.

DEMANDE.

La fille qui a ses ordinaires peut-elle aussi se laisser baiser?

RÉPONSE.

Non; car il faut dans la fouterie observer certaine bienséance de
propreté et d'usage: est-il rien en effet qui répugne tant à l'homme que
cette maladie périodique des femmes? quel spectacle plus dégoûtant
qu'une pine barbouillée d'ordinaires? Je sais que les femmes dans ce
temps sont beaucoup plus passionnées, qu'elles bandent avec plus de
luxure; mais il ne faut pas que l'envie de foutre les portent à
occasionner aux hommes des regrets cuisants et à s'en faire haïr.
Lorsqu'une fille se sera déclarée au fouteur pour être au temps de ses
règles, si le satyre veut néanmoins qu'elle fasse le service, que sa
pine barbotte alors dans son con, la fille n'a plus rien à se reprocher;
qu'elle profite même de cet instant de rage foutative pour se servir de
ce vit enragé comme d'un excellent frottoir pour se débarbouiller la
matrice. Cet expédient lui est permis, parce que le fouteur a voulu
passer par-dessus les _règles_. Elle doit néanmoins, après le coup tiré,
avoir soin d'offrir un vase et de l'eau à ce laveur de con, afin qu'il
puisse décrasser sa pine; elle doit aussi en faire autant de son côté;
l'empressement qu'elle doit avoir d'être bientôt quitte de cette plaie
mensuelle, lui en fait naturellement un devoir.

DEMANDE.

Une putain est-elle tenue de foutre avec un homme vérolé?

RÉPONSE.

S'il ne lui est pas permis de baiser avec un homme sain lorsqu'elle-même
est gâtée, elle a le même privilège de ne point foutre avec celui qui a
mal au vit; c'est à elle à y voir clair et à s'assurer avant de la
propreté de son fouteur; pour vérifier ses reliques, elle doit elle-même
décalotter le vit, pressurer le bout du prépuce pour voir s'il n'en sort
pas de la matière; elle doit en outre considérer la chemise, et si elle
s'aperçoit que cette chemise ressemble à une carte géographique, c'est
un signe visible que la pine est malade et qu'elle ne peut, sans
s'exposer au danger, foutre avec un tel homme. Le seul expédient qui lui
reste, c'est le service de la main, ou la fouterie en cuisses ou en
tétons.

Théodore de Méricourt
Catéchisme libertin à l'usage des filles de joie et des jeunes demoiselles

jueves, 2 de junio de 2011

Déclaration des citoyennes publiques



Déclaration des droits des citoyennes du Palais Royal
(haut lieu de la prostitution parisienne sous l´Ancien Régime)

Septembre 1789

Les citoyennes du Palais Royal constituées en Assemblée souveraine et législative (en effet, ne font elles pas la loi aux hommes ?), considérant que l'Assemblée nationale de Versailles acharnée à extirper les abus de toute espèce, et surtout étant sur le point de supprimer les moines, peut bien juger à propos de supprimer les filles, arrêtent et décrètent les articles suivants:

I. Les femmes naissent égales aux hommes et libres comme eux. Si elles naissent libres, elles doivent rester libres jusqu'à leur dernier soupir.

II. La liberté entraîne la propriété de sa personne. Elles peuvent donc faire de leur personne ce qu'elles jugent à propos.

III. Les hommes étant déclarés libres par l'Assemblée nationale, ils peuvent conséquemment faire à peu près ce qu'ils veulent, pourvu toutefois que leurs actions ne soient point contraires à la loi, qu'ils ne troublent point l'ordre établi et ne nuisent à personne : s'il est libre aux hommes d'aller chez les femmes, il doit être libre aux femmes de les recevoir.

IV. Les citoyennes du Palais Royal pourront à l'avenir, comme elles l'ont fait par le passé, se promener dans toute l'étendue du jardin, aller, venir, étaler leurs grâces, dévoiler leurs appâts aux yeux des hommes qui les convoitent, et cela sans causer de scandale, bouder les uns, agacer les autres, et aller souper avec tout le monde.

V. L'Assemblée nationale ayant aboli les jurandes et maîtrises, l'Assemblée législative des citoyennes du Palais Royal abolit pareillement les rétributions qu'elles ont été obligées de payer jusqu'ici à la police.

VI. Dès qu'une femme publique devenue particulière aura trouvé un homme qui l'entretiendra d'une manière sinon fastueuse, du moins honnête, elle ne pourra avoir un second amant, à moins que ce soit par amour et non par avarice. La pluralité des bénéfices est défendue lorsque le revenu de ces bénéfices excédera la somme de 1500 livres.

VII. On ne peut ni commander ni défendre l'amour ; mais la loi peut restreindre un commerce de plaisirs où l'attrait de la fortune à la fois, et de la volupté, entraîne les femmes de tous les rangs et de toutes les classes.

VIII. Toute citoyenne, aux restrictions près que peut y apporter la loi, a le droit d'exposer ses appâts partout où bon lui semble, d'acquérir des grâces, de trafiquer de ses charmes, de faire un commerce aussi agréable que lucratif, et d'employer ses facultés et ses talents à ses plaisirs et à sa fortune.

IX. Ainsi, libre dans sa personne, elle peut se vendre ou se donner à celui qui lui plaît davantage ou qui paie le mieux.

X. Ainsi, libre dans ses actions, elle peut aller courir, souper, coucher chez qui lui plaît, faire son commerce dans tel quartier de Paris, dans telle ville du royaume qu'elle voudra.

XI. Si les femmes sont nées égales aux hommes, elles sont à plus forte raison égales entre elles. Ainsi le préjugé qui les avilit n'existera plus désormais, nulle profession agréable ou utile n'emportera dérogeance.

XII. Tous les citoyens de quel rang, de quel sexe qu'ils soient, sont donc égaux. L'égalité civile consiste à n'être soumis qu'à la loi, et à pouvoir
également réclamer sa protection.

XIII. Comme les citoyennes du Palais Royal tiennent leur bien du public, elles contribueront aux charges publiques en raison de leur fortune actuelle.

XIV. La loi est l'expression de la volonté générale; nul ne peut faire ce qu'elle défend, ni être forcé de faire ce qu'elle n'ordonne pas. Ainsi toute femme publique étant libre d'exercer sa profession, est libre aussi de la quitter, sans qu'aucun homme ait le droit de la forcer à se rendre à ses désirs.

XV. Mais la loi ne peut être juste et bonne qu'autant qu'elle est faite à l'avantage de la société, sans contrarier la nature; la loi doit donc protéger une profession où mène le voeu de la nature, et qui est aussi utile qu'agréable à la société.

L'Assemblée, après avoir entendu la lecture, voulut qu'on discutât les différents articles. Alors Mademoiselle A... se leva et attaqua vivement l'article VI. Mademoiselle A... est entretenue par un F... et un riche B... de la rue Saint Honoré. Elle était intéressée à l'article et elle voulait le faire supprimer ou du moins l'adoucir par des amendements. On alla aux voix, et l'article resta tel qu'il était.

Mademoiselle R... voulut qu'on ajoutât à l'article VII, la défense aux femmes mariées d'empiéter sur le commerce des femmes publiques; mais après bien des débats il fut décidé qu'on laisserait ce soin à la puissance exécutrice des maris.

L'article XIII a été le sujet de beaucoup de débats. Ce n'est pas qu'aucun des honorables membres refusât de contribuer aux impositions communes; mais serait il facile d'apprécier au juste les revenus annuels de chacun? le champ de la galanterie a ses bonnes et ses mauvaises années. Quel impôt asseoir sur une fortune aussi précaire et aussi fugitive? On discuta longtemps, et après bien des débats, on décida que l'impôt serait réglé sur le ton, l'élégance, le costume et les ameublements de la personne.

Divers autres articles furent soumis à un examen aussi sévère; mais ils obtinrent enfin la pluralité des voix, et ils furent aussitôt décrétés en ces mots.

L'Assemblée reconnaît et déclare les droits ci dessus des citoyennes du Palais Royal, et les met sous la sauvegarde des lois et de la nation. Elle lance toutes les foudres de sa colère sur ceux qui voudraient y porter atteinte, et déclare ne reconnaître aucun veto qui pût les anéantir.

martes, 18 de mayo de 2010

Je t'emmerde



"Tout marcha bien. Le type, un gros angliche, lui donna deux guinées et ne se rhabilla pas si vite qu’elle n’eût auparavant le temps de lui chiper son portefeuille. Elle lui laissa sa montre, parce que, demain, il y aurait encore des montres. Son coup fait, elle pensa, comme au temps de Paris :

– Salaud, je t’emmerde.

Elle n’eut pas à remettre de chapeau ; elle n’en mettait jamais. Un coup de pouce au chignon, un coup de poing à la jupe, les mains au tablier où sont les poches, puis en route.

Dans la rue, elle se dépêcha pour rejoindre son homme. Quand il ne la suivait pas, elle savait où le trouver : au Cercle, avec les copains. En chemin, près de la Tamise, elle rencontra le policeman qui, un jour, l’avait coffrée ; lui ou un autre. Comme elle marchait vite, il ne pouvait rien lui dire. Elle avait, pour les flics, des idées très précises. Elle tourna la hanche :

– Toi, je t’emmerde !

Ouf ! ce qu’elle suait dans ce cochon de Londres ! Dans ces ruelles, les gens couchaient par terre, et pas tous sur des paillasses : il y avait des hommes avec des femmes, des vieux, des jeunes, des nichées de pauv’ gosses. Cela puait le poivre. Cela puait aussi comme dans une chambre après l’amour. Elle constata ce qu’elle constatait tous les jours : que beaucoup de ces femmes étaient jeunes, avec de bonnes cuisses et de cette chair encore verte qui plaît aux hommes. Elle pensa :

– Sont-elles bêtes, quand il y a tant de types.

Enfin c’était leur affaire.

On les emmerde !

Au Cercle, elle frappa ses trois coups. C’était bon, le soir, se retrouver, dans cette espèce de cave, et de blaguer, entre camarades, comme si qu’on arrivait tout droit des ponts de Grenelle. Henry-le-Gosse vint ouvrir. Il tira sa casquette. Il dit :

– Tu sais, ton homme, y s’impatiente.

Elle plaisanta.

– Va donc, je t’emmerde..."



A. Baillon